Congrès CDKL5 Londres 2018

Traduction du post de Ana Mingorance, PhD, Loulou Foundation
http://www.draccon.com/dracaena-report/cdkl5forum2018


Ces quatre dernières années, la « Loulou Foundation » a organisé une réunion annuelle sur invitation au cours de laquelle des scientifiques et des labos pharmaceutiques travaillant sur le trouble CDKL5, ainsi que des représentants d’associations de patients, se sont rencontrés pour discuter des dernières avancées. C’était le deuxième forum auquel j’ai assisté et le premier depuis ma participation à la Loulou Foundation.

Des nouvelles importantes ont été annoncées au cours de la conférence, comme un nouvel essai clinique en phase 2 sur le trouble CDKL5 à base de Fenfluramine, un médicament qui est en essais cliniques en phrase 3 sur le syndrome de Dravet avec une très grande efficacité, ainsi que l’annonce de Ultragenyx sur le démarrage de travaux sur de la thérapie génique.

Pour ceux d’entre vous qui n’ont pas participé mais qui sont intéressés, voici les principales informations à retenir du Forum CDKL5 2018 qui s’est tenu à Londres, au Royaume-Uni, les 22 et 23 octobre:

LE DÉVELOPPEMENT DE THÉRAPIES POUR LE TROUBLE CDKL5 A PROGRESSÉ TRÈS RAPIDEMENT

L’un des chercheurs sur le trouble CDKL5 a expliqué qu’il y a 4 ans, il n’y avait que 20 publications sur CDKL5. Quatre ans plus tard, il était dans une pièce avec près de 200 scientifiques et labos, discutant de 4 essais cliniques. Ce qu’on peut dire aujourd’hui, c’est que nous aurons peut-être déjà approuvé les premiers médicaments symptomatiques d’ici 4 ans et nous allons mener des essais cliniques sur le traitement par substitution d’enzyme ainsi que sur la thérapie génique qui est en cours de développement. Cette vitesse de développement dans une maladie rare est vraiment remarquable.

Le médecin en chef de Marinus a repris ces commentaires en rappelant au public qu’il y a un an à peine, les régulateurs discutaient pour savoir si le «trouble CDKL5» était vraiment une maladie ou tout simplement un gène pouvant présenter autant de syndromes différents que de mutation. Après que la Loulou Foundation et les associations de patients se soient mobilisées et aient veillé à ce que le trouble CDKL5 soit répertorié dans les principaux sites de classification des maladies et documenté en tant qu’entité distincte, la FDA (Food and Drug Administration) a non seulement accepté l’indication, mais également approuvé le premier essai pivot (Phase 3) sur la maladie. Nous sommes passés de l’absence de trouble reconnu à l’obtention du feu vert pour un essai pivot en quelques semaines.

  1. L’INDUSTRIE EST VIVEMENT INTÉRESSÉE PAR LE TROUBLE CDKL5

En plus de Marinus Therapeutics, qui est en train de recruter pour son essai de phase 3 pour le trouble CDKL5, 58 entreprises se trouvaient dans la salle lors du Forum CDKL5 2018. La conférence de l’année dernière à Boston a rassemblé 35 entreprises, mais je pense personnellement que la plupart d’entre elles n’étaient présentes que parce qu’elles ont des bureaux sur place et qu’il était facile de venir jeter un œil sans un réel intérêt. Le fait que 23 entreprises supplémentaires se déplacent à Londres signifie que l’intérêt dépasse la simple curiosité opportuniste et que la liste des programmes en développement pour traiter le trouble CDKL5 va probablement s’allonger au cours des prochaines années, à mesure que cet intérêt se concrétise dans les programmes de développement.

La Loulou Foundation a honoré les sociétés Takeda et Ovid Therapeutics lors du Forum en reconnaissance de leur contribution à la recherche et au développement thérapeutique du trouble CDKL5.

Les études actuelles pour le trouble CDKL5 comprennent un médicament en essais clinique en phase 3 et trois médicaments en essais cliniques en phase 2 :

Phase 3: Ganaxolone , de Marinus Therapeutics,  disponible actuellement dans 40 sites cliniques de l’UE et des États-Unis . Il s’agit du seul essai en phase 3 contrôlé par placebo (requis pour l’enregistrement du médicament). Par conséquent, une fois terminé, Marinus devrait être en mesure de demander l’autorisation de mise sur le marché. L’entreprise estime recruter 70 à 100 patients au total.

Phase 2: Ataluren , de PTC Therapeutics, termine actuellement une étude contrôlée par placebo au NYU Langone Medical Center auprès d’enfants atteints d’un trouble CDKL5 causé par des mutations de type non-sens. Cette étude a inclus 9 patients.

Phase 2: OV935 (TAK-935) , d’Ovid Therapeutics en partenariat avec Takeda,  qui s’inscrit actuellement pour une étude ouverte par l’intermédiaire de plusieurs sites aux États-Unis sur un total de 15 patients présentant une mutation CDKL5.

Phase 2: La fenfluramine , de Zogenix, va bientôt commencer à s’inscrire à une étude ouverte menée par un investigateur au NYU Langone Medical Center sur des enfants atteints d’une mutation CDKL5. Cette étude qui recrutera 10 patients a été annoncée pour la première fois au forum CDKL5 à Londres.

  1. LES ENTREPRISES DÉVELOPPANT DES TRAITEMENTS SIMILAIRES À CEUX pour le TROUBLE CDKL5 AVANCENT DE MANIÈRE AGRESSIVE

Amicus a récemment annoncé une collaboration autour d’une nouvelle technologie basée sur l’AAV (thérapie génique) destinée à compléter son traitement enzymatique en cours de développement pour le trouble CDKL5. Avec cette nouvelle approche, l’enzyme CDKL5 pourrait être sécrétée directement au cerveau du patient à travers un virus.

Le premier jour de la réunion du Forum CDKL5 2018 a apporté la nouvelle révolutionnaire selon laquelle Ultragenyx, l’un des acteurs les plus puissants dans le domaine des maladies rares, avait conclu un accord avec RegenXBio, l’un des acteurs les plus actifs dans le développement de la thérapie génique, afin de travailler sur la thérapie génique pour le trouble CDKL5.

Compte tenu du vif intérêt que suscite cette maladie rare et de ses possibilités de traitement via le remplacement de l’enzyme et la thérapie génique, nous verrons probablement augmenter le nombre d’entreprises travaillant sur ce thème et, espérons-le, des essais cliniques débutant dans quelques années.

  1. LES CONNAISSANCES PRÉCLINIQUES ET LES OUTILS PRÉCLINIQUES ONT BEAUCOUP PROGRESSÉ

Nous avons beaucoup progressé dans notre compréhension de la biologie du gêne CDKL5 et des conséquences de sa déficience sur les cellules et les animaux. L’une des avancées majeures de l’année écoulée a été l’identification de certains des substrats de CDKL5, qui ont été découverts dans des laboratoires distincts en utilisant différentes approches et constituent donc des résultats très solides.

Il était également encourageant de constater que de nombreux modèles de souris ont été générés avec le trouble CDKL5, qu’il leur manque le gène, qu’elles portent des mutations des patients et qu’il existe certains phénotypes solides reproductibles d’un laboratoire à l’autre qui peuvent aider à effectuer des essais précliniques dans ce trouble. Fait intéressant, ces souris ne font pas de crises d’épilepsie spontanées, mais étant donné qu’il y a déjà quatre médicaments en essai clinique pour gérer les crises, ça ne pose pas de problème à l’industrie pharmaceutique que les souris ne convulsent pas. Le consensus dans la salle était qu’une « souris est une souris » et tant que les souris ont des phénotypes neurologiques clairs qui sont motivés par la déficience du gêne CDKL5, ils sont de bons modèles.  L’expérience la plus attendue, celle de «sauvetage», dans laquelle on réactive l’expression du gêne CDKL5 chez des souris précédemment déficientes , est sur le point de commencer grâce à la création d’un modèle de souris, les résultats sont très attendus par toute la communauté de chercheurs.

  1. PRÉPARER LE TERRAIN POUR DES ESSAIS CLINIQUES PLUS COMPLEXES

Lors du forum, nous avons également indiqué que, même si les premiers essais cliniques sur le trouble CDKL5 utilisent la fréquence des crises comme critère principal d’efficacité, les futurs essais cliniques devraient permettre de mesurer plus largement l’invalidité développementale de la maladie et toute amélioration potentielle par rapport au traitement. Des conférenciers d’Ultragenyx et de Roche ont expliqué comment l’industrie abordait l’élaboration de nouveaux résultats cliniques et l’importance des collaborations pré-concurrentielles. La Loulou Foundation et l’IFCR (Association de parents aux Etats-Unis) prévoient d’organiser une réunion externe avec la FDA en 2019, qui aidera également à identifier de nouveaux résultats cliniques significatifs.

Le Dr Emil Kakkis, d’ Ultragenyx et de  EveryLifeFoundation , captivant et inspirant, a  expliqué au public son parcours pour convaincre le secteur que le développement de traitements thérapeutiques pour des maladies rares en valait la peine, ainsi que certaines de ses victoires et approches pour faire de ces aspirations une réalité. Il a lancé un appel en faveur de l’utilisation de résultats multi-domaines et de biomarqueurs dans des essais cliniques sur des populations rares, et a expliqué pourquoi il pense que l’âge d’or des traitements de maladies rares touche maintenant le trouble CDKL5 :

«C’est une période passionnante pour les maladies rares, et le trouble CDKL5 est au centre des préoccupations. La collaboration et la coopération sont nécessaires pour identifier les meilleurs résultats dans les meilleurs délais. “

  1. IL EXISTE UNE FORTE COMMUNAUTÉ DE PATIENTS DERRIÈRE LE TROUBLE CDKL5

La très jeune association « CDKL5 Alliance », regroupant 15 associations de patients ainsi que la Louloun Foundation, a annoncé lors du forum CDKL5 le lancement de son site Web dans l’espoir de permettre à toute famille dans le monde entier de se tenir au courant des progrès réalisés sur le terrain et de communiquer avec d’autres familles de patients (http://www.cdkl5alliance.org).

L’Alliance CDKL5 s’est réunie au cours du forum et a défini certaines de ses prochaines priorités, notamment l’identification d’un plus grand nombre de patients et la mise en place de centres d’excellence dans chaque pays, de sorte que la communauté soit prête à mener plusieurs essais cliniques. Ils reçoivent également le prix Champion of Progress 2018 de la Loulou Foundation pour la construction et le maintien de la communauté.

Au cours du Forum, les groupes de patients et la Loulou Foundation ont été crédités d’avoir joué un rôle déterminant dans les progrès considérables réalisés jusqu’à présent sur le terrain, qu’il s’agisse de fournir le financement initial clé aux laboratoires de recherche, d’aider à créer des centres d’excellence et de contacter les entreprises pour les encourager à prendre en compte leur trouble et à les aider. Le secret des points 1 à 5 de ce résumé est le résultat de la forte communauté de patients derrière le trouble CDKL5.

Les groupes de patients et la Loulou Foundation ont également réussi à créer une communauté plus large dans laquelle se retrouvent des scientifiques et des développeurs de médicaments. Cela a été particulièrement visible lors du forum CDKL5 2018, où développeurs de médicaments ont côtoyé des scientifiques universitaires et des cliniciens en tant que conférenciers et modérateurs, et où des séances plénières pour aider à concevoir l’avenir de la recherche sur CDKL5 se sont tenues autour d’un repas, sans distinctions.

Dans l’ensemble, c’était une très bonne réunion scientifique, avec une forte collaboration de tous les secteurs de la communauté CDKL5, et il est devenu évident que, comme l’a dit le Dr Kakkis, le trouble CDKL5 est aujourd’hui au centre des préoccupations et que nous avons une réelle opportunité de changer l’avenir de la maladie.

Ana Mingorance, PhD


CDKL5 Alliance Francophone